LE CHÂTEAU DE BOIS CHARMANT
TOUTE PETITE HISTOIRE DE BOIS-CHARMANT
La plus ancienne mention d’un seigneur de Bois-Charmant, nommé Colin Naudy, apparaît sur une pièce notariale appelée contrat de baillette, daté de 1408, époque du règne de Charles VI. Ce document foncier médiéval, consistait à enregistrer la donation d’un terrain, faite par un seigneur à un paysan, faisant de lui un propriétaire et matérialisant ainsi son indépendance. Le seigneur suivant, Guillaume de Refuge, acquiert le domaine en 1441, et sa famille le conserve jusqu’en 1460, lorsqu’une fille de la famille de Refuge épouse Arnault de Balodes, qui reprend le titre.
De ce Moyen Âge tardif ne semblent demeurer que la cave du château, le mur d’enceinte, fort écrêté sur le côté ouest, et des éléments de son entrée fortifiée. Sauf la cave naturellement, cet état ancien des lieux est visible sur un dessin gravé de Claude Chastillon, architecte de Henri IV, daté de 1605. C’est, peu avant cette époque, que l’essentiel du château actuel fut construit. Mais par rapport au dessin il apparaît que sous le règne de Louis XIV, la toiture du logis, à deux longs pans, fut refaite « à la Mansart », et que de nouvelles grandes baies furent percées.
Par un jeu de mariages entre gens de noblesse, le château et le titre vont traverser l’Histoire, voyant se succéder 14 familles, jusqu’en 1881. C’est alors que château et domaine, divisés en deux parts, tant terrains que bâtiments, sont vendus à deux familles d’agriculteurs qui accentuent cette partition.
S’il est admis qu’un premier château existait à l’époque de Colin Naudy, durant les quelque 5OO ans de son existence seigneuriale, le château a vu se succéder des propriétaires bien différents. Les uns, attirés par la vie de cour et ses faveurs possibles, résidaient peu à Bois-Charmant, tandis que d’autres, attachés à la terre, s’efforçaient de tirer profit de son exploitation.
Bien que loin de la cour, Bois-Charmant et ses occupants eurent les honneurs d’une réelle proximité avec la famille royale. La première fois lorsque Jeanne d’Albret, reine de Navarre, vint s’installer à La Rochelle pour y organiser un pouvoir réformé, son fils Henri, le futur Henri IV, parcourut maintes fois les seigneuries de Saintonge et, selon les récits populaires, fit plusieurs séjours à Bois-Charmant. Plus tard ce fut un de ses petits–cousins, François chevalier d’Albret, descendant de Jeanne d’Albret, qui, par mariage avec la fille d’un seigneur de Bois-Charmant, hérita la seigneurie et en porta le titre. Ce personnage, guerrier farouche, fut Maréchal de Camp du Régiment d’Aquitaine, mais il était aussi un bretteur redoutable et un prédateur de la gent des jeunes et nobles dames. Ces deux caractéristiques firent de lui le meurtrier en duel du marquis de Sévigné, et malgré son talent, la victime fatale, en 1672, d’un duel avec un jeune seigneur dont il avait gravement offensé la mère. C’est sur un note bien plus romantique, bien que mettant en cause un royal prédateur, que la jeune et fort belle, Bonne de Pons, fille cadette de Pons de Pons, seigneur de Bois-Charmant, fut invitée à Versailles par un oncle quelque peu courtisan. Cet homme plein de bienveillance pour sa nièce, et d’espoir d’intéressante charge pour lui-même, présenta Bonne, radieuse, au Roi-Soleil lequel, aussitôt charmé, en fit sa maîtresse. Un conte de fée, bien réel mais limité par les nécessités du don de soi du souverain, auquel mit fin quelques rapides années plus tard, la redoutable marquise de Montespan.
Ayant franchi sans dommages pour ses pierres, les guerres de religion, la Fronde et la Révolution, le château, en tant qu’édifice seigneurial, achève son existence avec le morcellement de 1881, en même temps que commence une douloureuse dégradation qui ne va s’interrompre qu’avec l’achat, en 1972, du château et de son domaine, par un couple d’érudits amoureux du Patrimoine, les Hermans, qui vont en entreprendre la restauration. Au décès de ses parents, leur fils revend le domaine en 2O17 à Catherine et Denis Rebord, les actuels propriétaires.
Le château connaît alors sa vraie renaissance, avec la poursuite des travaux de restauration, mais également la mise en place d’animations culturelles et ludiques. Ainsi, Bois-Charmant retourne aux temps lointains où les fées et les magiciens aidaient les chevaliers à combattre les forces obscures des sorciers et des dragons qui souhaitaient nuire aux jeunes filles aimantes de la forêt et de ses douces créatures.
Aristide Mauve-le-Duc
Archiviste de Bois-Charmant